mercredi 30 septembre 2009

L'ex-évêque d'Antigonish accusé de possession de porno juvénile

Mgr Raymond J. Lahey, l'évêque démissionnaire d'Antigonish, est accusé de possession de pornographie juvénile. Il a été interpellé à l'aéroport d'Ottawa le 15 septembre dernier lorsque des agents des Services frontaliers ont trouvé de la pornographie juvénile dans son ordinateur portable lors d'une fouille aléatoire. Mgr Lahey rentrait alors d'un voyage aux États-Unis. Les agents l'ont laissé partir, sans porter d'accusations.

Mais vendredi dernier, le 25 septembre, un mandat d'arrêt pancanadien a été émis à son endroit pour possession et importation de pornographie juvénile. La police d'Ottawa a indiqué que les agents des Services frontaliers poursuivent leur enquête, sans toutefois donner plus de détails sur le contenu de son ordinateur.

Le lendemain, Mgr Lahey démissionnait.

Plus de détails suivront

De la pitié à la haine
Qu'il soit reconnu coupable ou non importe peu sur l'effet médiatique de cette annonce. Quelques heures à peine après la parution de la nouvelle aujourd'hui, les internautes se déchaînaient, tant chez les francophones que les anglophones.

Sur le site du National Post, une femme rappelle que ce sont surtout des prêtres qui ont été pris dans de telles histoires jusqu'à présent. « Sera-t-il le premier parmi plusieurs évêques ? », questionne-t-elle.

Du côté de radio-canada.ca, une dame n'hésite pas à dire sa gêne d'être catholique, tandis qu'un homme de Gatineau affirme « que le niveau de confiance va encore baisser envers le clergé ».

Entre les propos et incendiaires et les accusations, un petit malin se demandait si l'évêque aura droit à une pétition en sa faveur, comme le cinéaste Roman Polanski, accusé d'avoir violé une fillette de 13 ans il y a plusieurs années.

Au moment de sa démission en fin de semaine, les catholiques éprouvaient de la pitié envers cet homme dont le travail épiscopal à Antigonish a été marqué par la sombre histoire d'abus sexuels commis dans ce diocèse au cours des dernières décennies. Après avoir supervisé le règlement du recours collectif de 13 millions $ pour les victimes, et après avoir présenté des excuses officielles au mois d'août, il partait la tête haute.

Son départ semblait clore cette sordide histoire une fois pour toutes.

Mais à peine quelques jours après la démission de Mgr Raymond J. Lahey, voilà que les plaies d'un diocèse meurtri et honteux s'ouvrent à nouveau, effaçant du même coup les récentes années de repentance.

lundi 28 septembre 2009

Après les abus sexuels, Antigonish est secoué par la démission de son évêque

Quelques semaines à peine après l'approbation du règlement du recours collectif de 13 millions $ selon lequel le diocèse catholique d’Antigonish doit dédommager des victimes d’abus sexuels commis entre 1950 et 2009, voilà que l’évêque démissionne.

Dans une lettre adressée aux catholiques de son diocèse en fin de semaine, Mgr Raymond J. Lahey a affirmé démissionner pour des « raisons personnelles ». « Je suis conscient que ma démission survient à un moment où le diocèse doit faire face à plusieurs défis », a-t-il indiqué, sans faire explicitement référence à la sordide histoire d’abus sexuels qui a ébranlé ce diocèse néo-écossais au cours des dernières années.

À la fin de sa lettre, Mgr Lahey, visiblement ébranlé, explique qu’il a déjà quitté le diocèse pour prendre le temps de se ressourcer spirituellement.

Au cours des années passées à Antigonish, il a eu la lourde tâche de porter le poids des fautes commises par certains prêtres de son diocèse. Il a présenté des excuses officielles l'été dernier, dans le cadre d'une conférence de presse organisée au début du mois d'août.

Mgr Lahey était évêque d’Antigonish depuis 2003. Entre 1986 et 2003, il était évêque du diocèse de Saint-George’s, dans la province de Terre-Neuve, d’où il est originaire. À 69 ans, il était encore à six ans de l’âge de la retraite canonique pour un évêque.

Mgr Mancini à la rescousse
Le pape Benoît XVI a donc procédé samedi à la nomination de Mgr Anthony Mancini comme administrateur apostolique du diocèse d’Antigonish. Mgr Mancini continue toutefois d’assumer ses responsabilités actuelles comme archevêque de Halifax et administrateur apostolique de Yarmouth.

Comme administrateur apostolique d’Antigonish, Mgr Mancini aura tous les pouvoirs d'un évêque résidentiel pendant la vacance du siège épiscopal.

En tant que membre de la Conférence des évêques catholiques du Canada (CECC), Mgr Mancini a fait partie de Commissions épiscopales pour la liturgie et pour l’éducation chrétienne (Secteur anglais). Il est actuellement membre du Comité permanent pour les communications.

Mgr Mancini est né en Italie en 1945. Il a été ordonné prêtre à Montréal en 1970. En 1999, il est devenu évêque auxiliaire dans la métropole québécoise. Il est archevêque d’Halifax depuis 2007.

Mgr Mancini a nommé son porte-parole hier, en la personne du père Paul Abbass. Ce dernier a immédiatement remercié le pape pour la rapidité de la transition, rappelant les nombreux défis du diocèse. Il a fait directement référence au règlement de 13 millions $ pour promettre aux victimes qu'elles ne seront pas affectées par le départ de Mgr Lahey.

Une première au Canada
Rappelons que la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse a approuvé le 10 septembre dernier ce règlement de 13 millions $ conclu entre le diocèse d’Antigonish et des victimes d’agressions sexuelles. Les faits reprochés remontent jusqu’aux années 50.

C’était la première fois au Canada qu’une affaire concernant des agressions sexuelles de la part de membres du clergé se règlait à l’extérieur des tribunaux.

La Cour suprême a déterminé que l’entente est juste et équitable pour les gens impliqués. Jusqu’à 70 victimes pourraient bénéficier de cette entente pour des agressions commises par différents prêtres.

Le diocèse d’Antigonish devra vendre plusieurs propriétés pour trouver l’argent nécessaire pour payer ces dédommagements.

jeudi 24 septembre 2009

Crayon et goupillon à la télévision

L'émission Zoom diffusée à Télévision Sel et Lumière (Salt + Light) faisait mention de Crayon et goupillon le 21 septembre dernier. Il était question de la note parlant de la plénière de l'Assemblée des évêques catholiques du Québec.

Cliquez sur ce lien et choisissez la date en question pour voir l'émission.

En passant, l'animateur de cette édition, Jasmin Lemieux-Lefebvre, qui agit à titre de Responsable de la programmation de langue française pour Télévision Sel et Lumière, travaillera temporairement en tant que responsable des communications au diocèse de Québec. Il remplacera Isabelle Théberge pendant son congé de maternité de 15 mois. M. Lemieux-Lefebvre entrera en fonction le 26 octobre.

mardi 22 septembre 2009

Rumeur réfutée : le Montmartre canadien n’est pas à vendre

Le Montmartre canadien n’est pas à vendre et ne devrait pas l’être dans un avenir proche. Le supérieur provincial des assomptionnistes a mis fin aujourd’hui aux récentes rumeurs voulant que la congrégation des Augustins de l’Assomption s'apprête à se départir de ce sanctuaire dédié au Sacré-Cœur.

Le père Marcel Poirier, supérieur provincial et local, est catégorique : « Nous avons notre projet apostolique et nous avons l'intention de le continuer ». Les assomptionnistes poursuivront donc leur travail à Sillery. Les cours et les sessions de formation offerts au Montmartre continuent d'ailleurs cet automne. Et depuis plusieurs années, le sanctuaire est également hôte du Festival de la Bible, dont la prochaine édition aura lieu au mois d'août 2010.

Aux sources de la rumeur
La convergence de plusieurs éléments a pu servir à alimenter une telle rumeur. Premièrement, la communauté a bel et bien reçu des offres. « Elles n'étaient pas suffisamment généreuses pour nous pousser à vendre », a toutefois révélé le père Poirier.

Deuxièmement, le Montmartre canadien comporte plusieurs bâtiments : la chapelle du Sacré-Cœur, le Centre Culture et Foi, la communauté des aînés et la communauté internationale de formation. Le vaste terrain, situé à Sillery, surplombe le fleuve Saint-Laurent et représente un réel attrait pour les gens d'affaires de Québec. À ce propos, le père Poirier a laissé entendre que certains promoteurs ont évoqué, sans succès, la possibilité d'acheter une parcelle du terrain.

Enfin, le supérieur provincial lui-même refuse de faire des promesses à long terme. « Pour l'instant, il n'est pas question de vendre. Mais dans 15 ans, nous ne savons pas encore quelle sera la situation », a-t-il confié.

La congrégation des Augustins de l’Assomption est née en France en 1850. Elle est aujourd'hui présente sur les cinq continents. Le Montmartre canadien, ou Sanctuaire du Sacré-Coeur, a été fondé en 1925, au moment de l'arrivée des assomptionnistes au Québec.

jeudi 17 septembre 2009

Le cours ECR au menu de la plénière des évêques du Québec

L’épineux cours d’éthique et de culture religieuse (ECR) sera au menu de la rencontre plénière de l’Assemblée des évêques catholiques du Québec (AECQ) qui se tiendra du 21 au 24 septembre à la Maison de la Madone, au Cap-de-la-Madeleine à Trois-Rivières.

Il s’agit de l’une des deux rencontres plénières annuelles de l’épiscopat québécois. Cette rencontre automnale est habituellement le moment où les différents comités de l’AECQ remettent leurs rapports.

Mais cette année, c’est avant tout le cours d’éthique et de culture religieuse qui pourrait retenir l’attention. Rien n’est encore déterminé, mais selon le service des communications de l’AECQ, tout porte à croire que les évêques en parleront lors de la conférence de presse prévue le 23 septembre.

L'envers de la médaille
Échaudés il y a un an par le dur traitement réservé dans les médias au cardinal Jean-Claude Turcotte suite à la décision de remettre sa médaille de l’Ordre du Canada pour contester l’attribution de cet honneur du docteur Henry Morgentaler, les évêques du Québec réalisent sans doute le sort qui les attend s’ils s’aventurent trop loin sur le cours ECR lors de leur conférence de presse cet automne.

Rappelons que la position des évêques québécois laisse sceptiques plusieurs parents qui s’opposent désormais de longue date à l’obligation de suivre ce cours. Et après le revers juridique des parents au procès de Drummondville au début du mois de septembre, la tension a remontée d’un cran.

Une position délicate
L’AECQ n’a jamais condamné le cours ECR. En mars 2008, elle promettait, non pas d’adopter, mais de « maintenir » une attitude « critique et vigilante » dans ce dossier. Essentiellement, l’épiscopat québécois voulait accorder au gouvernement le temps de prouver les bienfaits de ce programme.

En avril 2009, en réponse aux Chevaliers de Colomb du Québec qui venaient de prendre position contre le caractère obligatoire du cours ECR, Mgr Martin Veillette, président de l’AECQ, leur répondait dans une lettre (28 avril 2009) que « les objectifs du cours d'Éthique et de culture religieuse méritent d'être considérés à leur juste valeur. En eux-mêmes ils ne justifient pas, à nos yeux, qu'on demande l'exemption du cours pour des enfants ».

Mais contrairement à la question de l’avortement avec le docteur Henry Morgentaler, la plus grande opposition pourrait venir des catholiques eux-mêmes. Plusieurs catholiques québécois jugent en effet que l’AECQ manque de leadership, voire qu’elle peine à mettre en application la volonté de Rome en ce qui concerne l'éducation religieuse à l'école. En revanche, d'autres approuvent cette décision épiscopale car selon eux l'enjeu réel réside beaucoup plus dans la capacité de l'Église du Québec à organiser efficacement ses réseaux de formation catéchétique pour les croyants de tous les âges.

L'enjeu
La position est délicate pour les évêques. Pour l'instant, le temps joue en leur faveur. S'ils réussissent effectivement à consolider au fil des années à venir des parcours de formation catéchétique plus efficaces et à resserrer les liens entre les communautés de croyants, ils auront réussi à tirer profit des changements provoqués par l'arrivée du nouveau cours d'éthique et de culture religieuse. Mais s'ils échouent et, pis, si les craintes des parents opposés au cours ECR en viennent à être partagées par une écrasante majorité de catholiques dans la province, l'échec prendrait des décennies à corriger, un luxe que l'Église n'a visiblement pas en ce moment.

Il sera donc intéressant d'observer quelle importance prendra le cours ECR la semaine prochaine parmi les autres sujets qui seront également abordés, dont la catéchèse. La question du vocabulaire employé risque d'être intéressante à analyser pour déterminer si la position de l'AECQ évolue ou non au sujet du cours ECR.

mercredi 9 septembre 2009

L'héritage de la visite de Jean-Paul II au Canada

Le 9 septembre 1984, le pape Jean-Paul II débarquait à Québec et débutait son voyage apostolique de 12 jours au Canada. De Sainte-Anne-de-Beaupré à Montréal, des milliers de catholiques ont suivi à la trace le périple du pape polonais dans la partie québécoise de sa visite, en faisant ainsi la visite d'un chef d'État la plus suivie dans l'histoire du pays. Vingt-cinq ans plus tard, face aux défis de décroissance de l'Église catholique au Québec, une question se pose : que reste-t-il de son passage, de ses discours et de la ferveur des foules ?

Le moins que l'on puisse dire, c'est que peu de médias s'intéressent à cette affaire. Les grands médias, dont ceux financés par les deniers publics, effleurent à peine le sujet, alimentant d'autant plus la question de l'héritage du passage de Jean-Paul II.

Mais cette peur de voir son séjour sombrer dans l'oubli n'est pas récente. Dès le lendemain de son départ, plusieurs prêtres ont eu l'impression que tout redevenait « normal », comme s'il n'était jamais venu. Un curé montréalais me faisait remarquer aujourd'hui, brandissant le recueil des interventions publiques de Jean-Paul II au Canada en 1984, que le clergé québécois n'a jamais pris la peine d'analyser en profondeur le contenu de ces textes avec un peu de recul.

Précurseur
Or justement, à la lecture des discours du pape au Québec, il est étonnant de voir à quel point il a touché tous les éléments clés qui allaient alimenter les débats sociaux au Québec dans les années à venir : famille, individualisme, matérialisme, abandon de la foi, relations entre foi et raison, et entre religion et État. Dans son homélie à l'Université Laval, il disait ceci :

« La culture - et de même l’éducation qui est la tâche première et essentielle de la culture - est la recherche fondamentale du beau, du vrai, du bien qui exprime au mieux l’homme, comme “le sujet porteur de la transcendance de la personne”, qui l’aide à devenir ce qu’il doit “être” et pas seulement à se prévaloir de ce qu’il “a” ou de ce qu’il “possède”. Votre culture est non seulement le reflet de ce que vous êtes, mais le creuset de ce que vous deviendrez. Vous développerez donc votre culture d’une façon vivante et dynamique dans l’espérance, sans peur des questions difficiles ou des défis nouveaux; sans pour autant vous laisser abuser par l’éclat de la nouveauté, et sans laisser s’installer un vide, une discontinuité entre le passé et l’avenir; autrement dit, avec discernement et prudence, et avec le courage de la liberté critique à l’égard de ce qu’on pourrait appeler “l’industrie culturelle”; surtout avec le plus grand souci de la vérité. »

À Sainte-Anne-de-Beaupré, il a souligné à quel point les Amérindiens comptent parmi les plus pauvres de la société. Il n'a pas tu les relations difficiles entre les Blancs et les peuples des Premières Nations.

Au stade olympique, il a exhorté les jeunes à prendre garde aux paradis artificiels. Ses références aux problèmes économiques sont encore d'actualité aujourd'hui. Après tout, le stade olympique, ce n'était pas seulement Céline Dion...

À bien des égards, Jean-Paul II avait su déterminer les grandes questions qui allaient se poser au Québec.

La question autochtone
La question autochtone est, en rétrospective, l'un des plus grands accomplissements de Jean-Paul II au Canada. N'ayant pu se rendre rencontrer certains peuples des Premières Nations dans le Nord en 1984, il a insisté pour revenir le faire quelques années plus tard après un voyage aux États-Unis. D'ailleurs, il ne fallait pas oublier ce voyage en lui parlant du Canada ! Il se faisait un point d'honneur de le rappeler à son interlocuteur. Idem pour son entourage : dans le cadre d'une entrevue que je faisais avec le cardinal Stanislaw Dziwisz, qui fut le secrétaire personnel de Jean-Paul II pendant 40 ans, je lui demandais ce qui l'avait le plus frappé lors de la visite du pape. Sa réponse ? « - Laquelle au juste ? »

Anecdote à part, il faut savoir que le pape polonais insistait fortement sur la notion d'autodétermination des peuples autochtones. Il était devenu presque ironique, au milieu des années 80, de voir que certains des messages d'espoir les plus sentis venaient de la plus haute autorité de l'Église catholique, l'Église même dont trop de diocèses et de communautés religieuses avaient administré de façon honteuse les « pensionnats autochtones » pendant des années.

L'héritage de cette insistance de Jean-Paul II envers le respect des autochtones au Canada a culminé cette année alors que Phil Fontaine, alors Chef national de l'Assemblée des Premières Nations (APN) s'est rendu à Rome avec Mgr James Weisgerber, le président de la Conférence des évêques catholiques du Canada (CECC). Ensemble, ils ont rencontré le pape Benoît XVI. Cela est venu marquer un point tournant dans la « normalisation » des bonnes relations entre l'APN et la CECC. Regrettant le passé, chacun s'est engagé à regarder conjointement vers l'avant.

Un travail de compréhension à faire
Quelle importance accorder à ce voyage papal ? Vingt-cinq ans plus tard, la question se pose comme au lendemain du départ du pape.

Les sujets d'actualité ont tendance à paraître importants lorsque tout le monde en parle pendant des années. Or, qui a parlé du voyage du pape au Québec ? À part des collections d'anecdotes personnelles et des plaques sur des bâtiments, qu'est-ce que l'Église du Québec a trouvé à dire à ce sujet depuis 1984 ?

Autrement dit, faut-il vraiment s'étonner que les médias n'en parlent pas ?

jeudi 3 septembre 2009

ECR : le jugement de Drummondville et la déchirure catholique

Le récent jugement défavorable aux parents dans le procès de Drummondville au sujet du caractère obligatoire du cours d'éthique et de culture religieuse fait mal. En plus de la défaite et du fait que le juge Jean-Guy Dubois n'estime pas que ce cours cause un préjudice grave aux parents, une douloureuse réalité accompagne le jugement rendu en Cour supérieure : le différent, loin d'opposer exclusivement l'État aux parents, est caractéristique d'une déchirure interne dans le catholicisme québécois.

Des positions pour et contre le cours d'éthique et de culture religieuse (ECR) se retrouvent au sein du catholicisme québécois. Des positions respectives qui suscitent de grandes suspicions et qui alimentent une crise de légitimité des autorités catholiques, créant de ce fait même, avec une particularité toute québécoise, une situation semblable à celles qui s'observent ailleurs dans le monde sur la question de l'intégrisme.

Évêques et théologien
Plusieurs parents n'ont toujours pas digéré la décision de l'Assemblée des évêques catholiques du Québec (AECQ) de donner son aval au nouveau cours. À leurs yeux, il s'agit d'un acte de haute trahison. Plusieurs ne cachent pas leur dégoût d'un épiscopat québécois qu'ils considèrent comme faible, mou et déphasée de Rome.

En soi, la situation est ironique : en partant du principe qu'un bon catholique doit reconnaître la canonicité des positions romaines, on s'en prend à l'épiscopat, la quintessence de la représentation hiérarchique dans l'Église. Une manière de court-circuiter l'AECQ et de nier en quelque sorte la légitimité de l'épiscopat québécois et de sa prise de parole.

Ensuite, il est remarquable de voir avec quelle hargne le professeur Gilles Routhier, un prêtre théologien qui enseigne à la Faculté de théologie et de sciences religieuses de l'Université Laval, a été pris à partie suite à son intervention en tant que témoin expert lors du procès de Drummondville. Le professeur Routhier est longuement cité dans le jugement de Jean-Guy Dubois, qui a vu en lui un expert neutre qui « fait une présentation globale des enseignements de l'Église catholique et de la position de ses dirigeants démontrant que l'enseignement des autres religions ne brime pas la liberté de conscience de qui que ce soit ».

Tant pour les évêques que pour le professeur Routhier, leurs propos qui vont à l'encontre de ce que plusieurs parents opposés au cours aimeraient entendre provoquent un rejet en bloc de ces positions, un rejet qui va même, dans le cas du professeur Routhier, à une remise en cause de son appartenance catholique (!).

Crise au sein du catholicisme québécois
Les divisions que provoquent le cours d'éthique et de culture religieuse exacerbent davantage chez plusieurs parents catholiques le sentiment d'être ostracisés dans la société québécoise. La frustration qui en découle s'est cristallisée, suite à la décision du juge Dubois, autour de la question de la « catholicité » du jugement. La Coalition pour la liberté en éducation, principalement constituée de parents catholiques, a immédiatement jugé que « ce jugement est basé sur une interprétation de la religion catholique alors que nous réclamons le respect des droits de tous les citoyens, croyants comme athées ».

Cette déclaration de la CLE rappelle le discours, habile, qu'elle tient depuis le début de sa contestation. Elle sait en effet que d'avoir joué la carte catholique lui aurait probablement nui davantage qu'aidé auprès d'un vaste public. D'où le sentiment encore plus fort de frustration face à un jugement défavorable justifié par... des instances catholiques. La stratégie n'a pas fonctionné.

Entre un catholicisme qui n'existe plus et un catholicisme à venir encore en définition, l'enfantement est douloureux.

Le reflet de la planète catho
Face à ces questions, plusieurs Québécois ne comprennent pas leur Église. Il y a, d'une part, ceux qui disqualifient l'AECQ et tout point de vue catholique favorable au nouveau cours et qui provoquent une crise de légitimité de la prise de parole publique de l'épiscopat québécois, et, d'autre part, ceux qui disqualifient l'Église catholique dans son ensemble en jugeant sa vision du monde trop rétrograde.

Bref, au Québec par les temps qui courent, l'Église est à la fois trop molle et trop sévère.

Mais une telle situation n'est que le reflet d'une réalité plus vaste qui englobe depuis plusieurs mois déjà l'ensemble du catholicisme mondial. Elle s'inscrit dans le débat provoqué par la levée des excommunications de certains évêques de la Fraternité Saint-Pie-X par Rome au tournant de l'année. La vitalité de plusieurs groupes qualifiés d'intégristes étonne au fur et à mesure qu'ils osent élever la voix, tant en Amérique qu'en Europe. La planète catho prend conscience que l'héritage du Concile Vatican II est loin d'être une chose acquise, et que cet héritage est également soumis à une panoplie de lectures... dont celle de disqualifier, à tort ou à raison, la prise de parole d'instances catholiques bien en vue, au nom, ironiquement, du catholicisme.

mardi 1 septembre 2009

Cours ECR : amer revers des parents à Drummondville

Amer revers pour les parents qui s'opposent au caractère obligatoire du cours d'éthique et de culture religieuse qui entre cet automne dans sa deuxième année : la Cour supérieure du Québec, en la personne du juge Jean-Guy Dubois, a donné raison à la commission scolaire Des Chênes, au Centre-du-Québec, contre les parents dans un procès hautement médiatisé.

La décision a été rendue lundi. La requête des deux parents qui avaient porté plainte contre leur commission scolaire a été rejetée par le juge. Les parents songent à aller en appel.

Dans le jugement dit de Drummondville, « le tribunal ne voit pas comment le cours d'éthique et de culture religieuse brime la liberté de conscience et de religion des demandeurs pour les enfants, alors que l'on fait une présentation globale de diverses religions sans obliger les enfants à y adhérer ».

La présidente de la Coalition pour la liberté en éducation (CLE), Marie-Josée Croteau, estime que « ce jugement est basé sur une interprétation de la religion catholique alors [que la CLE réclame] le respect des droits de tous les citoyens, croyants comme athées ».

Deux autres jugements sont attendus suite à celui de Drummondville. Il s'agit d'abord de celui des élèves de Granby qui ont subi des sanctions pour ne pas assister au cours d'éthique et de culture religieuse. Ensuite, celui mettant en cause l'école privée Loyola High School de Montréal, qui demande le libre choix du contenu pédagogique. L'issue pourrait ne pas être la même puisque la décision devrait porter sur d'autres critères que ceux des droits et libertés qui étaient au coeur de l'argumentaire de Drummondville.