mardi 27 octobre 2009

Affaire Lahey : Mgr Ventura donne sa version des faits

À quelques jours de son départ du Canada, Mgr Luigi Ventura sort de son silence et donne sa version des faits en répliquant à La Presse au sujet du scandale Lahey.

Dans une entrevue téléphonique, le nonce apostolique tient d'abord à clarifier sa position sur le cas Lahey : « J'étais choqué, comme tout le monde. »

Quelques jours après l'annonce des accusations portées contre l'ex-évêque d'Antigonish pour possession et importation de pornographie juvénile, un article de La Presse reprenait à son compte les arguments de l'Association des victimes de prêtres du Québec. À en croire ce journal, Mgr Ventura aurait volontairement tenté « d'étouffer l'affaire Lahey ».

La Presse n'a visiblement pas cru bon de questionner le principal individu visé par de telles allégations avant de mettre sous presse. Ainsi, le journal prête des intentions à Mgr Ventura sans l'avoir préalablement consulté pour obtenir sa version des faits.

« Je suis arrivé d'Italie le dimanche (ndlr : 20 septembre), et j'ai été informé du fait qui s'était passé à l'aéroport (ndlr : 15 septembre) dans des termes très génériques. Le particulier, je l'ai su comme tout le monde, de la presse. Je l'ai lu dans les journaux », explique Mgr Ventura.

Mgr Luigi Ventura aurait-il dû faire éclater cette histoire au grand jour ? Pour répondre honnêtement à cette question, il importe d'avoir une bonne compréhension de la succession des événements.

Car contrairement à ce que suggère l'Association des victimes de prêtres du Québec, Mgr Luigi Ventura a réagi en dépit d'informations incomplètes.

Rappelons par ailleurs qu'un mandat d'arrestation n'a été émis que le vendredi 25 septembre et que, jusqu'à preuve du contraire, le matériel électronique et informatique confisqué à Mgr Lahey à l'aéroport d'Ottawa faisait partie d'une démarche pour déterminer s'il y avait matière ou non à enclencher des procédures judiciaires.

« Ce que j'ai reçu était suffisant pour démissionner », assure l'ambassadeur du Saint-Siège au Canada.

Autrement dit, dans ce cas, les soupçons ont suffi à mettre en branle le processus de démission. Le nonce a donc exhorté Mgr Raymond Lahey à démissionner.

« La lettre [de démission] est arrivée exactement à la nonciature avec le courrier normal le mercredi 23 septembre. J'étais arrivé le samedi 19 septembre à la nonciature, [de retour] d'Italie. La réponse de Rome est arrivée le 25, c'est-à-dire le vendredi. Et la nouvelle de la démission acceptée à été publiée le 26 », relate le prochain nonce apostolique en France.

Le mandat d'arrêt pancanadien à l'endroit de Mgr Lahey a été émis le 25 septembre par la police d'Ottawa. Rome a également confirmé le 25 septembre qu'on acceptait la démission de Mgr Lahey. Or, il ne saurait y avoir de lien de causalité entre ces deux événements : le décalage horaire, le processus déjà enclenché de la démission de Mgr Lahey, le mandat d'arrêt strictement canadien et le fait que l'existence de ce mandat n'ait été médiatisée que le 30 septembre sont autant d'éléments qui rend farfelue l'affirmation du contraire.

Le lien de causalité doit plutôt être établi avec l'interpellation de Mgr Lahey à l'aéroport. Ainsi, l'acceptation de la démission de l'évêque d'Antigonish est l'aboutissement d'un processus basé sur des soupçons. Il n'y avait encore officiellement aucune contrainte légale forçant cette décision.

Loin d'étouffer l'affaire, Mgr Ventura a au contraire exercé un véritable leadership confirmant on ne peut plus clairement la politique de tolérance zéro décrétée par Rome suite aux trop nombreux cas de pédophilie. Mais fallait-il pour autant ébruiter l'affaire ?

«La nonciature n'a pas le devoir de publier des nouvelles que je ne connaissais pas dans les détails », fait valoir Mgr Ventura, faisant référence à ces allégations selon lesquelles il aurait tenté d'étouffer l'affaire.

À part une incohérence sur sa date d'arrivée au Canada en provenance d'Italie, la version de Mgr Ventura tient la route.

Quant à la Conférence des évêques catholiques du Canada, Luigi Ventura affirme qu'elle était au courant, mais qu'elle n'en savait pas davantage.

« Le président de la Conférence des évêques catholiques du Canada était informé dans les termes que je connaissais. C'était très peu, et générique. »

Le prélat est catégorique lorsqu'on lui demande son opinion sur l'article alléguant qu'il aurait voulu maintenir un « voile de silence » sur l'affaire Lahey.

« Ce qui est paru dans La Presse, c'était de la pure fantaisie, de la mystification. Je le dis : de la mystification. Je n'ai pas compris l'intention et pourquoi ils ont voulu chercher (sic) comme ça », tranche Mgr Ventura.

Départ pour Paris
Mgr Luigi Ventura partira pour l'Europe le 4 novembre. Il intégrera ses fonctions de nonce apostolique à Paris vers la fin du mois de novembre.

L'annonce de son transfert a été faite le 22 septembre dernier. Or, la décision date du 9 juin dernier. On a donc laissé passer l'été entre la décision du Saint-Siège et l'annonce de cette décision.

Avant cette date, plusieurs rumeurs laissant présager cette nomination circulaient déjà.

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Retrouvez également cet article à l'adresse suivante : philippevaillancourt.com

samedi 24 octobre 2009

Ce qu'il faut retenir de l'assemblée plénière de l'épiscopat canadien (1re partie)

L'assemblée plénière annuelle de la Conférence des évêques catholiques du Canada vient de prendre fin. L'an dernier, les relations avec les autochtones avaient particulièrement retenu l'attention. En 2009, c'est plutôt une brochette de sujets chauds pour l'Église catholique qui a donné le ton à la rencontre.

Rassemblés à Cornwall en Ontario, les évêques ont d'entrée de jeu abordé le cas de Mgr Raymond J. Lahey, l'ex-évêque d'Antigonish qui doit répondre à des accusations de possession et d'importation de pornographie juvénile au Canada. Le président sortant de la CECC, l'archevêque de Winnipeg, Mgr James Weisgerber, en a profité pour traiter lui-même de la question.

« L’arrestation de Mgr Raymond Lahey a été particulièrement douloureuse en raison de la gravité des accusations, mais aussi parce qu’il met en cause un ancien membre de notre Assemblée, un frère dans l’épiscopat, et aussi, pour plusieurs d’entre nous, un ami », a-t-il indiqué.

Mgr Weisgerber a rappelé que depuis près de 20 ans, à la suite de la publication du document intitulé De la douleur à l’espérance, les diocèses du Canada ont affiché leur détermination « à protéger et sauvegarder la famille humaine et les communautés chrétiennes contre toutes violations de la dignité humaine et à porter une attention spéciale aux victimes et à leurs familles ».

Au terme de la première journée de l'assemblée plénière, les membres de la CECC ont accueilli Mgr Luigi Ventura, nonce apostolique au Canada, qui occupera dès la fin du mois de novembre la fonction de nonce apostolique en France, après huit ans au Canada.

Dialogue avec les anglicans
Peu de médias au Québec ont saisi cette semaine l'ampleur de l'importance de l'annonce faite par le Vatican de mettre en place des instances pour accueillir certains anglicans souhaitant quitter la Communion anglicane. Au Canada, le hasard a voulu que cela coïncide avec le passage du primat de l'Église anglicane du Canada, Mgr Fred Hiltz.

« Des barrières sont tombées, à notre grand étonnement », s'est-il réjoui. « Nous percevons maintenant une volonté accrue de travailler et de marcher ensemble. »

Mgr Hiltz a aussi profité de l’occasion pour inviter un représentant de la CECC à participer au prochain Synode général de l’Église anglicane du Canada et pour demander que l’on continue de réfléchir à la possibilité d’une rencontre conjointe des évêques anglicans et catholiques du Canada.

Rappelons au passage que 43% de la population canadienne est d'appartenance catholique, contre 7% pour les anglicans.

Par ailleurs, une partie de la troisième journée était consacrée au dialogue entre les catholiques et les anglicans.

Pro-vie : prise de conscience des évêques
Les évêques ont également abordé la question du respect de la vie. Ils ont parlé des positions connues de l'Église catholique sur l'avortement, l'euthanasie et le suicide assisté.

Le thème du respect de la vie est devenu un terrain glissant au Canada au cours des dernières années. À ce propos, l'évêque de London, Mgr Ronald Fabbro, a mis tous les évêques en garde.

« Si les évêques ne participent pas activement au débat, d’autres personnes ou groupes le feront à leur place», a-t-il précisé. « En un tel cas, il est possible que l’enseignement de l’Église soit déformé. Il nous appartient donc d’informer les catholiques de ce qui constitue le fondement de notre foi. »

Mgr Fabbro faisait référence à des groupes au sein même de l'Église catholique qui ont de plus en plus tendance à se radicaliser. C'est notamment le cas de Lifesitenews.com, le site Internet à l'origine de bien des prises de bec dans le Canada anglais. Le climat de dénonciation publique entre catholiques, qui ne sont pas toujours d'accord sur l'approche à avoir en matière de respect de la vie, a fini par mettre plusieurs évêques mal à l'aise.

Dans le cadre de cette plénière, plusieurs d'entre eux ont réalisé les limites qu'il y a à s'associer pleinement à de tels groupes.

Pour sa part, Mgr Blanchet a souligné que des tensions et des difficultés ont émergé au fil des ans chez les personnes et groupes qui se sont portés à la défense de la vie, depuis la conception jusqu’à la mort naturelle. Il a fait valoir l’importance de chercher une unité dans la pensée et l’action, en favorisant le dialogue entre les divers éléments du « mouvement pro-vie ». Un tel dialogue, a-t-il suggéré, permettrait d’éliminer les irritants à l’intérieur du mouvement et de trouver un terrain commun.

(2e partie à venir)

lundi 19 octobre 2009

Canonisation du frère André : il ne reste qu'une étape

La canonisation du frère André vient de franchir une étape clef. La Commission théologique de la Congrégation pour la cause des saints au Vatican vient de confirmer un deuxième miracle attribué au religieux de la Congrégation de Sainte-Croix. Il ne reste maintenant qu'une seule étape décisive avant de pouvoir dire « saint frère
André »
.

Cette nouvelle a été transmise par le vice-postulateur de la cause de canonisation du frère André, père Mario Lachapelle, c.s.c., en poste à Rome, le 17 octobre 2009.
« Selon l’opinion des théologiens, la guérison étudiée et déclarée scientifiquement inexplicable par une commission médicale en février 2009 est attribuée hors de tout doute possible à l’intercession de frère André. Il s’agit là d’une autre étape essentielle dans sa cause de canonisation », a précisé le père Lachapelle.

Dernière étape
La cause peut maintenant recevoir l’attention de la Congrégation ordinaire des cardinaux et des évêques composée de 15 membres, soit la dernière instance chargée d’étudier le cas.

Le mandat de ces derniers est de juger, entre autres, la pertinence d’étendre la dévotion à frère André à l’Église universelle. Après les recommandations des deux commissions (médicale et théologique) et l’avis de la congrégation de cardinaux et d’évêques, le pape Benoît XVI décidera des suites à donner à la cause de canonisation du fondateur de l'oratoire Saint-Joseph à Montréal.

L'universalité de l'homme
Il serait étonnant que Rome ne reconnaisse pas le caractère universel de l'homme. L'oratoire Saint-Joseph demeure l'un des plus grands centres de dévotion au père de Jésus dans le monde. Chaque année, des pèlerins du monde entier le visite. La figure humble du frère André transcende les cultures.

Par ailleurs, la canonisation du frère André revêtirait un caractère symbolique particulièrement fort pour l'ensemble de l'Église catholique qui peine à redéfinir son rôle dans un Occident de plus en plus sécularisé.

Cela permettrait au pays d'avoir son premier saint masculin né au Canada, un pays qui compte finalement peu de saints. Du côté masculin, il y a eu les saints Martyrs canadiens. Du côté féminin, il y a sainte Marguerite d'Youville et sainte Marguerite Bourgeoys.

samedi 17 octobre 2009

Épiscopat québécois : départ de Rolande Parrot

La responsable des communications de l'Assemblée des évêques catholiques du Québec vient de prendre sa retraite. Mme Rolande Parrot, qui occupait ce poste depuis 1998, quitte en partie en raison de la fatigue accumulée. Elle a déjà quitté ses fonctions.

Dès l'annonce de son départ cette semaine, des messages de remerciement et d'encouragement ont afflué, particulièrement sur le blogue de l'Association canadienne des périodiques catholiques.

Quant à l'avenir des communications à l'AECQ, le secrétaire général Bertrand Ouellet a simplement indiqué que l'exécutif devra se pencher sur cette question dans les jours à venir.

Mme Parrot a eu une longue carrière dans le domaine des communications ecclésiales. En 2008, elle a reçu le prix Marie-Guyart qui récompense une personne pour son travail dans l'univers des périodiques catholiques canadiens.

jeudi 15 octobre 2009

1,9 million $ : multiplication des pains pour Sel + Lumière

Au réveil ce matin, Télévision Sel + Lumière était plus riche de près de 1,9 million $. Grâce à quelques dons majeurs, cette chaîne câblée catholique tire plutôt bien son épingle du jeu dans la difficile joute des dons.

« Cette soirée est un témoignage du soutien important qu'obtient Télévision Sel + Lumière d'un bout à l'autre du pays », a affirmé le père Thomas Rosica, csb, pdg de la Fondation catholique Sel et Lumière média.

La somme a été amassée au cours d'une soirée bénéfice rassemblant 150 convives qui se tenait au Royal Ontario Museum. Ce gala 2009, Une soirée à la Mer morte, s'est tenu autour de l'exposition historique sur les Manuscrits de la mer Morte et des Dix Commandements du Deutéronome.

Retenons comme principal fait marquant de la soirée un don de 1 million $ de la part de la Fondation Hilary M. Weston pour la jeunesse (famille Weston) pour le développement de nouvelles émissions présentant les enseignements du pape Benoît XVI sur les relations interreligieuses.

Deux autres dons majeurs ne sont pas passés inaperçus : le Conseil suprême des Chevaliers de Colomb a donné 500 000 $, tandis que la famille Desmarais et Power Corporation du Canada a accordé 50 000 $ à la chaîne bilingue.

Sel + Lumière existe depuis à peine six ans et compte environ 2 millions de téléspectateurs au Canada.

mardi 13 octobre 2009

Investissements en patrimoine religieux : l'impact médiatique pourrait être mitigé

Le 6 octobre dernier, le gouvernement du Québec annonçait officiellement les montants accordés à la restauration du patrimoine religieux cette année. Or, contrairement à l'an dernier, il était ardu de mettre la main sur la liste complète des projets retenus auprès du ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine. Fait anecdotique ou changement de stratégie ?

Autrement dit, les journalistes ont pu connaître le total des investissements par région administrative du Québec, mais n'ont pas pu avoir accès à une liste détaillée des projets retenus pour l'ensemble de la province auprès du ministère. Cette liste peut cependant être consultée en cliquant sur ce lien, le site du Conseil du patrimoine religieux du Québec.

Pourtant, pour arriver au total de 23 millions de dollars, il a bien fallu compiler les montants des différents projets au ministère de la Culture. D'ailleurs, même la quantité de projets est précisée par région. La ministre Christine St-Pierre a donc fait une annonce de 23 millions de dollars avec un communiqué gouvernemental dépourvu de sa moelle.

Confusion au ministère
Ce qui est surtout inquiétant, c'est de constater que les responsables des communications du ministère n'étaient pas en possession de cette liste et n'étaient pas en mesure, au lendemain de l'annonce faite par la ministre dans l'église Saint-Dominique, à Québec, d'indiquer clairement aux journalistes où se la procurer.

On a simplement indiqué que, du côté du ministère, les annonces se feront au fur et à mesure dans les différentes régions. Par ailleurs, on n'a pas été en mesure de confirmer qu'il s'agit d'un nouveau plan de communications.

Veut-on permettre au Conseil du patrimoine religieux du Québec de briller davantage pour mieux se concentrer sur d'autres dossiers ?

Pourquoi cette confusion au sein des communications du ministère ?

Quant à savoir ce qui s'est réellement passé, tout n'est que spéculation.

Notons avant tout qu'il s'agit d'un changement d'approche comparativement aux années précédentes. Avant, dès que l'annonce était faite, la liste était disponible facilement auprès du gouvernement du Québec, ce qui permettait de comparer les différents projets un peu partout dans la province d'un rapide coup d'oeil.

Au compte-goutte
Mais cette année, l'information sortira visiblement au compte-goutte. Heureusement, le ministère a déjà commencé à détailler lui-même ses annonces régionales. Ainsi, le 9 octobre, on « apprenait » le détail des investissements au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Cette annonce a toutefois été nettement éclipsée par celle, faite le même jour, de 30 millions de dollars pour le monastère des Augustines à Québec. Déjà un problème de synchronisme médiatique...

Il faut dire que ces annonces « coïncidaient » avec le colloque international Des couvents en héritage qui s'est tenu à Montréal et Québec du 7 au 11 octobre, un moment pour le moins stratégiquement bien choisi pour faire des annonces d'envergure.

Malheureusement, ces annonces laisseront effectivement une impression de déjà vu tout au long de l'année pour tout journaliste qui aura consulté la liste détaillée des projets sur le site du Conseil du patrimoine religieux du Québec.

Le pari du gouvernement
Il semble raisonnable de présumer que le choix de répartir les annonces liées au patrimoine religieux vise à augmenter la visibilité médiatique de l'impact des investissements de la part de Québec. En étant amenés à en parler plus souvent, les médias du Québec contribueront peut-être à développer un plus grand sentiment d'appartenance envers des lieux de culte qui servent de moins en moins... au culte.

Mais l'effet contraire pourrait également se produire.

Le cas Bétancourt
Lors de la rencontre plénière des évêques du Québec il y a quelques semaines, la conférence de presse était prévue le mercredi. Or, cela coïncidait avec la visite au Québec d'Ingrid Bétancourt, l'ex-otage des Forces armées révolutionnaires de Colombie. Au moment même où se déroulait la conférence de presse des évêques, Ingrid Bétancourt recevait la médaille d'honneur de l'Assemblée nationale à Québec. Où étaient braquées les caméras à votre avis ?

Avec sa nouvelle approche, le ministère de la Culture risque de semer la confusion. En multipliant les annonces, une même question surgit inévitablement : les montants sont-ils compris dans le 23 millions $ du 6 octobre ? En plein le genre de question qu'un journaliste n'aime pas se poser plusieurs mois plus tard.

Les médias n'aiment pas la confusion. Plusieurs préféreront tout simplement se concentrer sur un autre sujet plutôt que de se prendre la tête sur des chiffres concernant le patrimoine. Dommage.

Cela fera-t-il en sorte que l'impact médiatique sera mitigé au cours de la prochaine année ? Nous aurons la réponse dans quelques mois...

lundi 5 octobre 2009

Le dalaï-lama à Montréal : lieux communs spirituels, lieux communs journalistiques

Le dalaï-lama a la cote auprès des médias québécois. De passage à Montréal samedi dernier, le chef spirituel des Tibétains a donné une conférence sur le thème de la compassion devant plus de 14 000 personnes au Centre Bell en après-midi. Mais avec les trop nombreux lieux communs spirituels et lieux communs journalistiques, Montréal ne retiendra sans doute que peu de choses du passage du Prix Nobel de la paix.

Le coeur du message du dalaï-lama a été livré à la fin de sa conférence. Parlant de la compassion, ce dernier l'a présentée comme une nécessité pour le monde moderne. Selon lui, cette nécessité doit occulter les différences. Le leader bouddhiste a ainsi classé la société en trois catégories. Dans la première catégorie, il place les croyants attachés à une religion théiste. Dans la seconde se retrouvent ceux attachés à une religion non théiste. Enfin, les gens sans religion constituent la troisième catégorie. Le défi, selon le dalaï-lama, consiste à transmettre le message que la compassion est valable pour tous et qu'elle transcende ces catégories.

Voilà une couverture superficielle de ce qu'il a dit... mais c'est déjà plus que ce qui a pu paraître dans les grands quotidiens québécois. C'est tout juste si les articles ne sont pas écrits avant son passage. Peu importe ce qu'il dit, les articles reprennent quelques idées générales. Par exemple, on revient sur sa personnalité sympathique, sur les relations avec la Chine et sur sa fameuse phrase selon laquelle « toutes les religions sont bonnes ».

Or, samedi après-midi, au Centre Bell, c'était loin d'être l'accueil de « vedette rock », comme l'ont écrit certains médias. Après l'émotion palpable qui a suivi son entrée en scène, l'ambiance est redevenue plutôt moribonde.

Problèmes techniques
Le dalaï-lama a choisi de l'exprimer en anglais, une langue qu'il ne maîtrise pas. Et malheureusement pour lui, la calibration sonore n'était pas au point. Résultat : son propos se perdait dans le gigantesque espace du Centre Bell. Et ça, c'est quand son micro fonctionnait. Les francophones ont cru un instant que les propos du sage seraient clarifiés par le moine français Matthieu Ricard, mais peine perdu : ce dernier parlait trop rapidement et articulait trop peu pour être facilement compréhensible.

Lieux communs spirituels
« Je suis un être humain parmi six milliards d'êtres humains », « Connais-toi toi-même et ouvre ton coeur aux autres » : répliques d'un dessin animé du samedi matin ou réflexions du dalaï-lama. La réponse étonne. Et déçoit.

Certes, il n'était pas là pour s'adresser à des initiés. Il a d'ailleurs invité la foule à ne pas avoir trop d'attentes envers lui. Malgré tout, la déception était visible chez plusieurs personnes à la fin de la séance. Car malgré la beauté et la véracité d'un message centré sur l'amour, l'accueil et la compassion, on s'attendait quand même à plus de la part d'un homme de la trempe du dalaï-lama. Alain Crevier, l'animateur de Second Regard à la SRC, offre également une réflexion du même genre...

Lieux communs journalistiques
Cela n'a pas empêché plusieurs journalistes de sombrer dans les sempiternels clichés entourant la couverture médiatique du dalaï-lama. « Alors que les églises au Québec ferment les unes après les autres, le dalaï-lama, lui, remplit le Centre Bell », peut-on lire sur canoe.ca.

D'autre part, on se demande si le journaliste de Rue Frontenac est resté jusqu'à la fin de la conférence. En tout cas, on aura compris qu'il a aimé la conférence de presse précédant l'événement.

Au journal La Presse, l'article était avant tout axé sur la question des relations avec la Chine. D'ailleurs, rares sont les journalistes qui ne réduisent pas une visite du dalaï-lama à cet élément.

Quant au Devoir, on a fait fort : une simple photo accompagnée d'un court texte qui trouve tout de même le moyen d'offrir le concentré des clichés évoqués plus haut. Il a toutefois le mérite d'être clair et de s'en tenir aux faits.

Finalement, c'est l'article de The Gazette qui se démarque du lot pour sa qualité. Et aussi parce que le journaliste, en faisant allusion à des moments qui sont survenus tardivement dans la conférence, démontre qu'il a réellement assisté à l'événement et pas seulement à la conférence de presse.